samedi , 4 mai 2024
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Maîtrisé avec panache par la « dame de fer » Christine Razanamahasoa, le ministère de la Justice de la transition est efficace en particulier sur le plan politique. Les magistrats et d’autres politiciens avaient déjà dénoncé la mainmise des autorités sur l’appareil judicaire. Dans la transition consensuelle, le poste de ministre de la justice sera une arme politique que les protagonistes concernés par des « affaires » ont intérêt à gagner.

Doit-en encore confier la justice à la mouvance Rajoelina ?

La mouvance Rajoelina a été le premier à tirer en revendiquant tous les ministères de souveraineté nationale. Comme prétexte, le jeune homme qui conforte en même temps son statut de président de la transition de fait, estime que les ministres concernés seront amenés à collaborer de manière étroite avec le chef de l’Etat. Ainsi, le ministère de la Justice, au même titre que les départements de la Défense, des Finances, de l’Intérieur et des Affaires Etrangères, ne devrait pas échapper à la mouvance Rajoelina.

Dans la configuration du gouvernement Roindefo II, seuls les ministères de la Justice et celui des Affaires Etrangères sont occupés par la mouvance Rajoelina, respectivement par Christine Razanamahasoa du Leader Fanilo et Ny Hasina Andriamanjato de l’AKFM Fanavaozana. Si ce dernier semble avoir la côte pour rester à la tête de la diplomatie durant la transition, la première est contestée en raison de son engagement politique incompatible avec l’indépendance de la justice.

A tort ou à raison, les doutes subsistent à propos de l’instrumentalisation de la justice pour amoindrir la mouvance Ravalomanana. Le ministère mène une véritable croisade pour décimer les leaders de l’ancien régime. Andry Rajoelina rebondit sur la question à l’approche des négociations à Addis Abeba. « Seules les personnes avec les mains propres et qui ne sont pas concernées par les affaires seront acceptées dans la cohabitation », prévient-il. En quelque sorte, c’est bien la justice qui a mis hors jeu les ministrables de la mouvance Ravalomanana. Il faudra attendre l’amnistie pour que ces prisonniers politiques soient réhabilités dans leur droit.

Selon l’Observatoire de la vie publique, SeFaFi,  l’indépendance de la Justice et celle des magistrats sera l’un des enjeux de la 4ème République. L’Affaire Monja Roindefo contre l’Etat a été un exemple flagrant d’une soumission des juges dans l’exercice de leur fonction juridictionnelle au pouvoir exécutif. Le ministère est intervenu officiellement par lettre et par voie médiatique pour que le conseil d’Etat prenne une décision contre la requête au plus vite avant de rectifier en affirmant que cette juridiction doit se déclarer incompétente pour juger ce qui relève d’un acte de gouvernement.

Le ministre de la Justice a influencé, sans se cacher d’ailleurs, une décision de justice. « Les expériences vécues depuis la Première République permettent de constater que le pouvoir politique est et restera une sphère d’influence, portée sur les interventions dans les affaires judiciaires », note le SeFaFi. L’observatoire préconise que la gestion de la carrière des magistrats ne soit plus contrôlée par le pouvoir politique. La non ingérence du ministère de la Justice dans les affaires judiciaires créées durant la crise politique sera primordiale dans le cadre de la transition consensuelle. Comme la société civile s’est désistée, ce ministère devrait échoir à la mouvance Zafy, celle qui n’est pas concernée par les affaires et n’a pas intérêt à utiliser la justice.