dimanche , 5 mai 2024
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La première grande décision de la Cour électorale spéciale a été plus que délicate, car il a permis de maintenir le candidat désormais officiel du pouvoir dans la course à l’élection présidentielle. Cette juridiction de la transition s’est donc lancée dans une sorte de démonstration par l’absurde pour expliquer que Hery Rajaonarimampianina peut bénéficier de toutes les violations de la loi tant que ce n’est pas lui, en tant que personne, qui les commet.

La CES maintient le candidat malgré les violations de la loi par le pouvoir

« La requête de sieur Rakoto Rahasinina Andrianjo RAZANAMASY, aux fins de disqualification du candidat Hery RAJAONARIMAMPIANINA, est rejetée », a tranché la CES. Elle déboute ainsi l’action du camp politique de Hajo Andrianainarivelo qui espérait accéder au second tour après avoir dénoncé les abus perpétrés par le candidat caché du régime Rajoelina.

Selon le code électoral malgache, « toute autorité politique, tout fonctionnaire d’autorité, civile ou militaire, candidats à une élection, ayant usé des prérogatives de puissance publique dont ils disposent pour influencer le choix des électeurs peuvent être disqualifiés ». Si le candidat du parti virtuel ou de circonstance Hery Vaovaon’i Madagasikara a bénéficié de ces prérogatives, la CES ne lui en tient pas rigueur : « n’étant plus une autorité administrative et, par là même, totalement étranger à l’administration, le candidat est insusceptible de détenir ou d’user des prérogatives de puissance publique ».

Une telle argumentation a du mal à passer quand on sait que quelques jours plus tôt, le président de la Transition lui-même s’est vanté d’avoir aidé le candidat et ministre des Finances et du Budget sortant durant la campagne électorale, mobilisant ses ministres. La faute ne serait donc pas au candidat qui « ne peut être tenu pour auteur des faits à lui reprochés, en l’absence de ladite qualité d’autorité publique, principal critère exigé de l’auteur des faits en cause ».

S’il y a quelqu’un à disqualifier, ce serait Andry Rajoelina qui a agi au mépris des lois et de la Feuille de route. Le vainqueur du premier tour, Jean Louis Robinson a déclaré qu’il demanderait au chef de la Transition de démissionner s’il veut faire campagne pour un candidat.

« La veille et le jour du scrutin, aucun candidat, ni ses représentants, ni ses comités de soutien ne peuvent faire une déclaration publique, sous quelque forme que ce soit, à la radio, à la télévision». Si la CES reconnait que Hery Rajaobarimampianina a bénéficié d’une diffusion de spot télévisé de campagne électorale sur la chaîne locale de télévision VIVA, appartenant à Andry Rajoelina, à Toamasina la veille du scrutin, elle décide que de « tels actes constituant une violation des dispositions pénales telles que prévues à l’article 155 du Code Electoral ne peuvent pas entraîner la disqualification ».

La Cour électorale rappelle que « l’utilisation des biens publics ainsi que des prérogatives de puissance publique, à des fins de propagande électorale entraîne l’annulation des voix… dans la ou les localités où l’infraction a été constatée ». Ce motif ne peut être valablement invoqué pour demander la disqualification d’un candidat.

Pour le cas des achats de vote à Maroalakely, Commune Manakara le 25 octobre 2013, Hery Rajaonarimampianina n’est pas inquiété puisque, selon la loi, «tout vendeur et tout acheteur de suffrage sont condamnés chacun à une amende égale au double de la valeur des choses reçues ou promises », donc pas de disqualification. Il a les moyens de payer des millions d’amendes.

Ce qui est étonnant, c’est que la CES n’a jugé les faits que pour démontrer que ceux-ci ne peuvent entrainer la disqualification. Est-ce que Hery Rajaonarimampianina, son équipe de campagne, Andry Rajoelina et ses ministres seront sanctionnés au regard de la loi ? Autrement, les mêmes abus et violations de la loi électorale risquent d’être répétés au second tour.

L’ancien ministre des Finances serait lavé de tout soupçon, puisque, de son aveu, il ne savait pas qu’il était le candidat du pouvoir. Pouvait-il ne pas savoir qu’il était en train de bénéficier des agissements illégaux des putschistes de 2009 pour avoir plus de voix et pour écarter certains de ses adversaires. Le candidat de Rajoelina, qui se défend de l’être, aurait échappé de peu à la disqualification par la CES. Une chaîne locale a révélé le Non l’avait emporté d’une seule voix.