vendredi , 3 mai 2024
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L’opération carte d’identité nationale a été lancée dans la commune rurale de Miary à Tuléar II. Cette première étape du processus électoral concocté par la mouvance Rajoelina n’efface pas encore les doutes sur la volonté et la capacité des autorités de fait à organiser une élection démocratique, reconnue sur le plan national et international.

Opération carte d’identité : des risques de fraudes préélectorales

Le lancement de l’opération carte d’identité nationale a été un succès. « Dans la commune de Miary, les gens se sont mobilisés », rapporte la ministre de l’Intérieur avec une certaine satisfaction. « La confection d’une carte d’identité est payante et la prise de photo d’identité n’est pas forcément accessible, cette opération est une réelle opportunité », poursuit Cécile Manorohanta. Pour elle, le caractère gratuit de l’opération explique cet engouement. La motivation n’est pas forcément politique même si le but affiché de l’administration est d’intégrer de nouveaux électeurs dans le système.
 
Le concept de guichet unique mobile a fait ses preuves à Tuléar II. Les citoyens deviennent des administrés en effectuant toutes les formalités en un seul endroit où diverses autorités sont représentées. Le chef Fokontany est sur place pour délivrer le certificat de résidence. Un médecin est présent en cas de doute sur l’âge biologique d’une personne. Il vérifie que le demandeur de carte d’identité est âgé de 18 ans au minimum. Un détail qui pourrait échapper à l’œil du photographe qui prend gratuitement les photos d’identité.

Le maire et un officier d’Etat-civil s’occupent des copies d’acte de naissance. Ils sont assistés des secrétaires. Le premier rôle revient au chef de district qui hérite d’un pouvoir de magistrat. Le représentant de l’Etat au niveau de la plus petite des collectivités déconcentrées a l’autorité de signer le jugement qui donne une identité officielle à une personne adulte. Le greffier contresigne ce document. Il y a des agents recenseurs qui prennent les demandes de ceux qui n’ont pas encore de carte d’identité nationale. Ces demandeurs font une déclaration sur l’honneur et viennent avec deux témoins pour prouver leur identité.

Le système paraît bien huilé mais question fiabilité, tout reste à prouver. Jusqu’à preuve de contraire, cette opération carte d’identité nationale laisse la porte ouverte à des fraudes préélectorales. L’exigence de deux témoins ne garantit pas l’authenticité d’une identité. Nombreux redoutent que des citoyens malveillants en profitent pour changer d’identité. Sur le plan politique, l’occasion est trop belle pour créer de nouveaux électeurs que ces derniers soient réels ou fictifs. Et encore, l’administration Rajoelina vise à intégrer moins de la moitié des 3,5 millions citoyens en âge de voter mais sans carte d’identité. Qui sera approché et qui ne le sera pas ?

Sur le plan technique, le fait que l’opération carte d’identité nationale ait lieu avant le recensement annoncé de la population soulève des doutes. Le recensement des électeurs sera influencé par ces quelque 1,5 million nouveaux citoyens. On aura donc une liste électorale considérablement allongée. Cela répond sur le plan quantitatif à l’objectif du président de la HAT d’intégrer des électeurs exclus du système. Cet électorat vierge promis à la mouvance Rajoelina pourra-t-il pour autant sacraliser le scrutin. Sinon, il va diaboliser un processus unilatéral par une manière inédite de manipuler la liste électorale.