vendredi , 26 avril 2024
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Plus de 50 000 nouveau-nés non déclarés ni enregistrés
Des parents venant d’enregistrer l'existence de leurs enfants, les actes de naissance en main (Ph. Programme EKA)

Plus de 50 000 nouveau-nés non déclarés ni enregistrés

Attribuer un acte de naissance à tous les enfants est un premier pas vers l’égalité des chances. A Madagascar, 17% des nouveaux nés n’ont pas le privilège d’exister officiellement. La situation s’est pourtant nettement améliorée ces dernières années grâce à l’initiative Ezaka Kopia ho an’ny Ankizy, sous l’impulsion de l’Unicef.

A Madagascar, la preuve de l’existence d’un enfant parait secondaire tant que la société, l’entourage et la famille reconnaissent sa naissance. « On appelle une grande personne par le prénom de son enfant précédé de maman de… ou papa de… c’est un fait culturel qui relie l’enfant à ses parents, explique Mme Martine, employé au service des naissances dans un arrondissement à Antananarivo. Un acte de naissance n’est vraiment indispensable que lorsque l’enfant va aller à l’école ». Elle estime que les parents issus de la couche sociale défavorisée sont souvent unis par un mariage traditionnel et l’absence de livret de famille est un frein. « C’est difficile pour un analphabète de faire les démarches pour déclarer et reconnaitre un enfant à la mairie, ça l’est encore plus quand il faut le faire au tribunal ».

Une problématique de développement

L’enregistrement des naissances n’a jamais été une nécessité absolue ni une obligation pour de nombreux parents. Il présente des variations selon les localités et le niveau de classe sociale, tendant à être plus élevé en ville et plus bas en milieu rural et chez les ménages les plus pauvres. En 2016, si les partenaires techniques et financiers s’intéressent à l’enregistrement des naissances, c’est parce que « le programme sur l’amélioration de l’Etat-Civil aidera pour le suivi et l’évaluation des populations dans les divers programmes de développement ». Selon les estimations de 2014, 33 enfants sur 1000 habitants sont nés pendant l’année, soit 726 000 naissances. Environ 51 000 nouveau-nés n’ont pas été déclarés, ce qui correspond à la moyenne annuelle.

« Nous appuyons le gouvernement dans ce programme, dont l’objectif final est de connaître le nombre exact de la population afin de faciliter les évaluations du Plan National de Développement (PND) et aussi, de déterminer les coûts », a déclaré Dimitri Sanga, Coordonnateur du Programme pour l’amélioration de l’Etat-Civil en Afrique. « A Madagascar, l’enregistrement des naissances de moins de 5 ans est de 83%. Donc, des efforts seront à entreprendre pour les 17% qui restent dans quelques régions. Les enregistrements de l’Etat-Civil, de la naissance au décès sont des droits à l’existence de la personne et de la population entière. Ce sont des preuves de sa filiation pour tout ce qu’elle va entreprendre tout le long de sa vie ».

Des enregistrements rétroactifs grâce au programme Eka

Le programme National Eka a permis de réduire le taux d’enfants non déclaré à la naissance, passant de 30% à 20% dans les années 2000. Cette opération acte de naissance consiste à une campagne d’enregistrement rétroactif des enfants non déclarés. Les moins de 15 ans ont été ciblés. Le programme récolte des dossiers et organise des audiences pour juger les cas des enfants et déclarer ces derniers si tous les critères sont remplis.

La démobilisation des parents nécessite encore des campagnes de sensibilisation. Ils sont toujours nombreux à ne pas être convaincus de la nécessité de la déclaration et de l’enregistrement de leurs enfants à leur naissance. « Pour le moment, c’est une responsabilité des parents, il faudrait peut-être changer les règles. La déclaration de naissance doit être obligatoire et que tout manquement sera sanctionné », soutient Mme Martine. « Les difficultés de la vie, parfois le simple éloignement de l’administration font que les formalités ne sont pas accomplies. Ce n’est pas évident », tempère-t-elle.

A. Herizo