jeudi , 2 mai 2024
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En instaurant de manière unilatérale et par voie d’ordonnance une « constitution » de la transition en remplacement de la charte signée à Maputo entre les quatre mouvances politiques, Andry Rajoelina s’enferme dans sa tour d’ivoire. Le président autoproclamé de la HAT se donne le plein pouvoir dans ce qui est qualifié de « bricolage » légal et glisse dangereusement vers une dictature.

Réorganisation de la transition : Andry Rajoelina se ré-autoproclame super président de la HAT

Dès l’exposé des motifs, l’ordonnance 2009-012 sonne faux. La HAT prétend s’inspirer de l’engagement d’une transition démocratique et inclusive, de l’avènement d’une « véritable démocratie » et d’un « réel Etat de droit ». Jusque-là, ce n’est que de la propagande. Andry Rajoelina se cache derrière le vague concept de « peuple » qui lui permet de décider seul au nom des malgaches. La souveraineté, l’autodétermination à choisir librement un statut politique, les acquis d’un mouvement populaire… ce qui appartient à ce peuple revient de droit à Andry Rajoelina. Et pour couronner le tout, c’est officiellement dans le but de rejeter toute forme d’arbitraire.

Le prétexte de cette « Constitution » unilatérale est l’impossibilité pour la HAT d’appliquer certaines dispositions de la charte de la transition et de l’acte additionnel. Andry Rajoelina accuse les trois autres mouvances de lui avoir volé une partie de ses pouvoirs et décrète que toute cohabitation devient impossible. Il renonce finalement à son titre « reconnu » de président de la Transition pour revenir à celui de président de la Haute autorité de la transition. Le jeune homme fort du pays réécrit l’histoire de la transition et rappelle qu’il a reçu le plein pouvoir des mains du directoire militaire. Il n’y a pas eu un coup d’Etat comme un braqueur d’épicerie expliquera au policier que la vendeuse lui a donné gentiment le contenu de la caisse !
 
La transition unilatérale version 2010 ne va durer que dix mois. Elle verra Andry Rajoelina comme étant un président qui est doté d’un pouvoir presque illimité. Celui qui a été élu maire d’Antananarivo s’octroie les prérogatives d’un chef d’Etat d’un régime présidentiel fort typiquement africain, pouvant nommer et limoger à loisirs. Il nomme le premier ministre et met fin à ses fonctions. Il nomme et révoque sur proposition du premier ministre, les membres du gouvernement. Il nomme les membres du Haut conseil de la transition, anciennement HAT, et met fin à leur fonction. En tant que chef suprême des armées, le président de la HAT nomme et révoque les principaux responsables de l’Armée, de la Gendarmerie et de la Police. Il nomme aux hauts emplois de l’Etat…

Le super président Andry Rajoelina contrôle la mise en ouvre de la politique générale de l’Etat et les activités des différentes structures de celui-ci.  Il proclame l’état d’urgence, l’état de nécessité nationale ou la loi martiale. Le président de la HAT aura du quoi s’occuper avec des actes de gouvernement bien fournis. Il adopte les ordonnances et décret, un exercice auquel il s’est livré fréquemment depuis un mois. Il promulgue lui-même ces lois et ordonnances. C’est Andry Rajoelina qui arrête le projet définitif de la Constitution de la quatrième République. Il peut convoquer un référendum même s’il a déjà décidé de faire voter la nouvelle Constitution par un une assemblée constituante où la chance de majorité est plus substantielle pour le TGV et ses alliés montés dans le wagon.

Dans des fonctions plus protocolaires, Andry Rajoelina préside les cérémonies officielles et confère les décorations de l’Etat. Il accrédite les ambassadeurs de Madagascar et reçoit les lettres de créance des représentants étrangers, une fonction qu’il a du mal à exercer faute de reconnaissance internationale. Seul le très pressé ambassadeur de France Jean Marc Châtaigner a fait exception. Le président de la HAT a aussi pour mission d’assurer la continuité de l’Etat et le respect des engagements internationaux de Madagascar. Avec tous ces pouvoirs qui s’accumulent autour de lui, il est compréhensible que Andry Rajoelina refuse la cohabitation. Madagascar n’est pas dirigé par un « maire » mais par un super président. Le manuel du petit dictateur est à lire, absolument !