vendredi , 3 mai 2024
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L’accouchement difficile a donné naissance forcément à une Commission électorale nationale indépendante difforme. Trois des dix-neuf membres de cet organe en charge d’organiser et d’arbitrer les élections n’ont pas encore été désignés, faute de proposition venant de l’opposition. La HAT désigne clairement les trois mouvances comme responsable de ce manque.

Une CENI incomplète et non « consensuelle », naissance au forceps

C’est en conseil des ministres que les autorités de fait ont officialisé, par le décret n° 2010/142, la constitution de la CENI. Cette mise en place hâtive est handicapée par l’absence des représentants de l’opposition. La HAT préfère faire une entorse aux résolutions de l’atelier Teny ifampierana et tant pis pour le consensus élargi. L’opposition a boycotté les pourparlers pour la composition de l’organe électorale. Le calcul politique de la mouvance Rajoelina comporte quelques erreurs suite à ce refus. Ce dernier était pourtant prévisible puisque la HAT s’est adressée officiellement aux trois mouvances pro-Maputo. Après la dure réaction aux sanctions de l’Union Africaine t appelant à des mesures contre Marc Ravalomanana, Didier Ratsiraka et Albert Zafy, le boycott était inévitable.

Pour faire bien les choses, les autorités de fait mise sur une absence volontaire des opposants. Elles éviteraient ainsi la responsabilité devant la communauté internationale, dont la HAT est toujours redevable malgré les discours extrêmes sur la souveraineté nationale, d’avoir exclu les trois mouvances dans le processus menant vers les élections. La mouvance Rajoelina  veut franchir un pas de plus dans la démarche unilatérale en faisant prêter serment les membres de la CENI incomplète. La publication d’un deuxième décret pour compléter la commission aurait été plus indiquée. Cette impatience traduit toutefois la détermination de la HAT d’avancer vers l’organisation d’une élection. Malheureusement, la composition tronquée de la CENI ne peut que mettre en exergue le caractère unilatéral de l’opération et met en doute l’indépendance de l’organe. Ambohitsorohitra ne s’embarrasse pourtant pas de l’absence des trois mouvances.

Le fondement juridique des élections organisées par la HAT se posent sur des textes aussi mouvants que le sable. Les autorités s’enlisent dans une démarche unilatérale qui est régulièrement ponctué de couacs mais foncent tête baissée, ou torse bombé. Une ordonnance personnelle de Andry Rajoelina pour réorganiser la transition et écarter définitivement la charte de Maputo dont il est l’un des signataires, un atelier revendiquant un consensus élargi pour valider la feuille de route de la HAT, un avis de la HCC estimant que cette CENI de la HAT est conforme à la constitution malagasy qui est purement virtuelle, l’artifice juridique manque un peu de légitimité. La mise en place de la CENI devait être le signe de la volonté politique pour l’organisation d’une élection libre, transparente et équitable. Ce n’est pas encore gagné.

La Commission électorale doit prendre le relais du ministère de l’Intérieur dans les préparatifs des élections. La vice-premier ministre de la HAT, estime que la mission de son département est achevé. « Laissons la CENI travailler librement, il appartient à tous d’en assurer le suivi, le ministère de l’Intérieur lui souhaite bonne chance », a-t-elle déclaré. Dans la pratique, le gouvernement de transition contrôlera encore en partie l’organisation des scrutins. Le financement, le démembrement dans les collectivités, les prérogatives… le fonctionnement de la CENI dans une situation réelle comporte encore de nombreuses incertitudes.