mercredi , 24 avril 2024
enfrit
CENI, la future commission électorale nationale infiltrée

CENI, la future commission électorale nationale infiltrée

C’est le tollé dans la sphère politique. La nouvelle majorité présidentielle a adopté le projet de loi sur la Commission électorale nationale indépendante. Le gouvernement a écarté de manière « illégale » la proposition de loi du parti VPM MMM, sans porter la considération minimale et obligatoire. Au final, c’est une commission facilement contrôlable par le chef de l’Etat et son parti qui sera mis en place. Une belle garantie pour les prochaines élections du présent mandat de Hery Rajaonarimampianina… et le prochain.

La polémique est née de la présence d’un représentant du président de la République dans la commission électorale. « Rien que ce seul fait illustre la volonté d’ôter à cet organisme son indépendance », s’indigne-t-on dans les rangs de l’opposition. L’excuse du régime actuel quand il infiltre une commission censée être indépendante du pouvoir est la minorité des représentants de l’Etat, rendant nécessaire la délibération avant la prise d’une décision. Seulement, avec la future CENI, le régime cache à peine son jeu. Il y aura des magistrats représentant plusieurs cours qui seront nommés pour s’assurer une majorité.

La présence d’un membre de la HCC est la plus critiquée. Le juge d’Ambohidahy sera à la fois juge et partie, la cour constitutionnelle devant valider les résultats définitifs publiés par la CENI. Les magistrats nommés dans cette commission ne sont-ils pas en mesure de rester neutres et indépendants ? Le cas de la HCC fait jurisprudence sur le plan politique. Eric Rakotoarisoa a été nommé par le président et il est devenu président de la cour constitutionnelle. Le juriste d’habitude objectif dans ses analyses et ses critiques a été pris par le jeu politique, réduit à justifier la légalité des décisions du pouvoir en réinterprétant les termes de la Constitution ou en inventant des propositions extra-constitutionnelles.

Une majorité pour contrôler la CENI

Il est clair que le régime HVM vise une majorité dans une commission de 9 membres. « Ce qui est étonnant, c’est le choix de mettre beaucoup de magistrats qui en principe ont la compétence pour juger les résultats, mais pas d’organiser les élections et de publier les résultats », souligne M. R, administrateur civil. Il s’offusque de la mise en écart des techniciens censés maitriser les arcanes électoraux. « Le ministère de l’Intérieur se méfie du savoir-faire des administrateurs civils qui risquent de mettre un grain de sable dans la machine électorale que les politiciens veulent mettre en place », avance-t-il. La société civile et l’Ordre des Journalistes risquent de ne pas peser lourd devant les autres membres qui recevront des ordres du pouvoir.

La future CENI devra donner un peu plus de légitimité au pouvoir en place par les élections sénatoriales de décembre 2015. Si les régionales sont organisées en 2016, la commission sera toujours la même pour le prochain mandat. Entretemps, Hery Rajaonarimampianina que beaucoup voient perdant ou même pas candidat en 2018 sera en bonne position. Lui et son parti pourront enfin espérer une vraie majorité parlementaire. La CENI sur mesure sera encore là pour faire élire les maires et les conseillers communaux du parti au pouvoir pour s’assurer une majorité dans le Sénat.

Le calcul politique a une nouvelle fois triomphé sur la logique démocratique. Vu l’incompétence avérée de la défunte CENIT et le manque d’indépendance de la future, il valait mieux confier les élections au ministère de l’Intérieur et ses techniciens. Histoire d’obliger le régime d’assumer ses micmacs électoraux.

A. Herizo