L’évènement devrait être historique, tout comme il pourrait être un camouflet de plus dans la quête de la réconciliation nationale, cet introuvable chemin qui mènera Madagascar vers un apaisement politique et une paix sociale durables. Il s’agit évidemment du très attendu sommet à 5 réunissant le président en exercice et les 4 autres anciens chefs d’Etat. Il y a beaucoup à gagner pour les uns, beaucoup à perdre pour les autres.
Et le prix de la réconciliation nationale est attribué à… Hery Rajaonarimampianina, parce qu’il a été le premier à faire un geste significatif en faveur de l’apaisement politique, ou au Ffkm parce qu’il a été capable de réunir les principaux protagonistes à réconcilier. Il faudra être patient pour juger qui aura finalement le plus contribué à réconcilier les anciens présidents, ceux qui étaient à la source des différentes crises politiques dans le pays, mais aussi la société malgache qui a été divisée par la politique.
Le président en exercice a dû montrer ses muscles et agir avec sévérité. L’arrestation musclée du président revenu d’exil a été une réponse à des propos un brin provocateurs et à des insinuations selon lequel l’actuel chef de l’Etat n’a pas de pouvoir. Hery Rajaonarimampianina a vite compris que Marc Ravalomanana est devenu son problème et qu’il vaut mieux apaiser la tension tout de suite. La présence symbolique de la mouvance Ravalomanana dans le premier gouvernement de la IVè république et l’adhésion de ses députés à la majorité présidentielle a facilité la réconciliation sur le plan politique.
Lors du premier acte du sommet à 5, le président actuel s’est engagé à libérer les prisonniers politiques. Il ne pouvait pas non plus retenir pus longtemps Marc Ravalomanana dans une prison confortable à Antsiranana. Il y avait une pression indirecte de la communauté internationale qui n’a lâché les premiers financements qu’à la fin de l’année 2014. Le régime en place a enfin émis des signaux forts et significatifs qui ont rassuré les partenaires étrangers sur la faible probabilité d’une nouvelle crise politique alors que le pays a retrouvé l’ordre constitutionnel.
Des concessions, le président a enfin pu en faire sans trop s’attirer les foudres de ses partisans, sous couvert du processus de réconciliation nationale. Le HVM ne peut avancer si les différends politiques ne sont pas aplanis. Le parti au pouvoir ne veut pourtant pas une cogestion, voyant le retour en force de la mouvance Ravalomanana. Paradoxalement, l’éviction du premier ministre Kolo, celui à qui le président devait beaucoup était un mini coup d’Etat de l’intérieur du parti bleu. On s’attendait certes à la promotion de l’un des grands barons du HVM, mais il y aurait toujours un débat sur la légitimité d’une telle nomination. Le pouvoir a par contre trouvé la parade pour défendre la légalité de ce qui parait aux yeux des opposants comme une violation manifeste de l’article 54 de la Constitution. La nomination d’un général de l’armée était donc la plus logique. La surprise est que Jean Ravelonarivo serait selon certains observateurs un homme de Didier Ratsiraka.
L’ancien président de la transition est le grand perdant de la réconciliation qui aurait pu être à son avantage si le Ffm ou Comité pour la réconciliation malgache avait pu la mener sans passer par un sommet à 4. Une seule lettre, un « k » a changé complètement la donne pour lui. Un 5ème président lui vole désormais la vedette. Andry Rajoelina va devoir se réconcilier avec Hery Rajaonarimampianina, celui qui a refusé d’être un président prête-nom et qui se permet de refuser au Mapar le poste de premier ministre qui lui reviendrait selon son interprétation de l’article 54. Rajoelina menace mais ne boude pas, furieux de perdre le pouvoir alors qu’il avait tout planifié dans une Constitution à sa mesure. Marc Ravalomanana lui a déjà pris par la main, l’une des scènes marquantes de la réconciliation. Albert Zafy est un peu spectateur. Rien d’étonnant puisque son ambition était de conduire… la réconciliation.
A.H