vendredi , 29 mars 2024
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La HAT a relancé le procès de l’affaire du présumé coup d’Etat militaire à la BANI pour épingler l’intellectuel Raymond Ranjeva et éliminer définitivement le Lt Colonel Charles Randrianasoavina, violant ouvertement la feuille de route qui a force de loi à Madagascar. Les verdicts prononcés donneraient des indications sur la relative indépendance de la justice dans le pays. Le tribunal reste-t-il un instrument politique aux mains du régime. Le Syndicat des Magistrats se rebiffe contre la main mise du ministre.

Y a-t-il encore une justice dans le pays ?

Malgré la protestation des opposants qui dénoncent une nouvelle manipulation de la justice à des fins politiques, en dépit de la demande des avocats de la défense de le reporter, le procès de l’affaire BANI a eu lieu. Par la plus grande des coïncidences, le jugement a été programmé après que le Pr Raymond Ranjeva s’est à nouveau manifesté pour expliquer la nécessité d’une nouvelle transition. Pire pour le régime, l’ancien juge du Tribunal pénal international se montre comme un candidat potentiel à la future élection présidentielle.

« Ils ont essayé de lier le Pr Ranjeva à l’affaire de la BANI mais ce n’était pas possible », savoure un de ses partisans. Pour son avocat, « les officiers ont fait la déclaration à Ivato sans que son client n’ait jamais été présent ». Le présumé coup d’Etat en question prévoyait en effet la création d’un Comité militaire. Raymond Ranjeva a eu raison d’afficher sérénité et confiance devant les juges. Il a été relaxé ainsi que sa fille qui s’est trouvée mêlée dans cet imbroglio politico-judiciaire.

Par contre, le régime a pu mettre hors d’état de nuire le Lieutenant-colonel Charles Randrianasoavina. Celui qui a fait le coup de force le 17 mars 2009 pour imposer Andry Rajoelina au directoire militaire a été condamné aux travaux forcés à perpétuité. Il est le seul à avoir été condamné de la sorte parmi le groupe d’officier qui a fait la déclaration de la suspension des institutions de la transition le jour du référendum personnel d’Andry Rajoelina le 17 novembre 2010. « Je l’ai aidé, j’ai mis le petit avion qui est à ma disposition pour l’évacuer à la Réunion, ce n’est pas moi qui vais demander à ce qu’on le condamne ainsi », s’est disculpé Andry Rajoelina sur une chaîne privée.

Quel crime le « colonel Charles » a-t-il commis pour avoir été sanctionné plus lourdement que ses supérieurs en la personne des généraux Rakotonandrasana et Raoelina qui ont écopé de 7 ans de travaux forcés. Il paierait ses menaces de tout révéler sur les dessous du coup d’Etat de 2009. Déjà, le célèbre officier a échappé à la mort dans la maison de force de Tsiafahy après avoir été rué de coups. Les autres militaires qui ont été liés directement à la déclaration d’Ivato ont récolté 5 ans de prison à l’instar du Colonel Coutiti.

Pour les opposants qui  ont dénoncé la tenue de ce procès politique, le tribunal n’a pas tranché comme il faut ni en liberté. Le Syndicat des Magistrats semble du même avis en prenant à parti la ministre de la Justice. Auguste Marius attaque de front Christine Razanamahasoa qui refuserait de signer la résolution des magistrats revendiquant la liberté et l’indépendance de la justice.

Pour le président du SMM, la ministre est le blocage de l’amélioration et de l’assainissement du système judiciaire. Il l’accuse de donner des ordres aux magistrats, citant comme exemple son intervention pour défendre un opérateur qui a plusieurs dossiers aux tribunaux. Si le malaise avec la police nationale s’est un peu dissipé, les magistrats se rebiffent contre leur ministre qui aurait de nombreux procès politiques à son actif depuis 2009. L’intéressée parle de « calomnie ».

Christine Razanamahasoa est une militante du mouvement TGV des premières heures, intronisée à son poste sur la place du 13 mai. La mouvance Rajoelina l’a maintenu contre vents et marrées avec pour mission d’empêcher le retour au pays du président évincé par le coup d’Etat de 2009. L’enjeu politico-judiciaire du moment et la loi d’amnistie dont la ministre a pu contrôler l’ébauche de la rédaction, mais que la sélection des amnistiables pourrait être confiée aux juges.