samedi , 11 mai 2024
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La saisie de bois de rose à Maurice en juin 2011 et le remue-ménage que cela a entraîné sur le plan social, politique et économique, a été un prétexte parfait pour lever à nouveau l’exportation. Andry Rajoelina souhaite mettre la main sur tous les stocks de rondins saisis et les vendre au nom et au profit de l’Etat pour financer des projets de développement. Cette belle déclaration d’intention soulève des doutes sur le profit et le risque qu’une nouvelle exception à l’interdiction va entraîner.

Bois de rose : la HAT s’octroie une exception à l’interdiction d’exportation

Alors qu’on cherche toujours les opérateurs économiques véreux accusés d’exportation illicite de bois de rose, Andry Rajoelina a surpris en faisant de ce trafic un commerce pour l’Etat. Lors d’une visite à Brickaville, le chef de l’autorité a fait un discours de propagande sur la lutte contre ce trafic qui ternit l’image de son régime. Il n’y a pas d’argent sale pour les autorités en place qui veut profiter de la situation pour avoir une source de financement providentielle

Comme le discours du chef de l’autorité vaut loi – il n’aura qu’à signer une petite ordonnance entre deux rendez-vous pour le formaliser après- la position de l’Etat malagasy exportateur de bois de rose laisse perplexe. La HAT elle-même a formellement interdit la coupe, le transport et l’exportation de bois de rose. Voilà qu’elle va transporter puis exporter des stocks officiellement saisis. Ce ne sera pas la première fois que l’autorité va violer une loi ou une règle qu’elle a elle-même établie de manière unilatérale.

Les bois de rose sont les produits d’un crime économique. Ces rondins ont été coupés en violation totale de la législation. « Personne n’est le propriétaire des bois de rose » a déclaré Andry Rajoelina. Et pourtant, la HAT veut que les stocks saisis issu d’une activité criminelle lui soient restitués. Techniquement, les biens volés sont restitués à son propriétaire en cas de crime économique.

L’éthique ne va pas embarrasser un régime qui peut outrepasser ses propres lois. En voulant revendre des bois de rose coupés illicitement, la HAT s’adonne à un recel d’un nouveau genre. Peut-on imaginer un régime qui décide d’exporter les cannabis saisis dans  son pays ? Une telle mesure va-t-elle décourager les paysans concernés à cultiver cette herbe aux vertus mondialement connues mais frappée d’une interdiction ?

Les associations de protection de l’environnement s’interrogent en effet sur le bien fondé de ce recel même si les utilisations annoncées de l’argent récolté sont louables. Chaque exception à la réglementation prétextant l’exportation des stocks déjà en place avait entraîné une véritable hémorragie dans les forêts primaires de Madagascar.

La crise de confiance envers une autorité de fait qui a le plein pouvoir sur tout soulève des doutes sur le profit que vont générer ces bois de rose « volés ». L’amalgame entre l’Etat et les dirigeants en tant que personnes avec des comptes en banque permet de craindre un nouveau trafic au grand jour et couvert par une légalité douteuse.  

Les six conteneurs de bois de rose saisis à Maurice auraient pu rapporter une dizaine de millions de dollars. Avec tous les stocks saisis ou encore cachés, l’autorité en place peut espérer des recettes intéressantes pour pallier la conséquence de la suspension des aides internationales. L’argent n’a vraiment pas d’odeur.