lundi , 6 mai 2024
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Amnesty International vient de publier un volumineux rapport sur la situation des Droits de l'Homme à Madagascar. Rapport qui tend à démontrer que les vieilles habitudes ont la vie dure. Si l'on ne peut qu'appuyer les recommandations faites au nouveau pouvoir de mieux respecter les lois et les normes internationales, on s'étonne de l'opportunité du moment choisi par Amnesty International pour publier un tel rapport après de longues années de silence. Ceci d'autant plus que les membres de l'ancien régime semblent vouloir utiliser cette ?arme? pour justifier un refus des résultats du scrutin de dimanche prochain.

La vérité sélective d’Amnesty International?

Cet intérêt si soudain d’Amnesty International surprend les organisations malgaches oeuvrant dans la défense des Droits de l’Homme. En effet, malgré la violence des exactions perpétrés par l’ex-président Didier Ratsiraka contre la population civile malgache, notamment dans la tuerie des adeptes d’art martiaux? kung Fu? en 1984 et la tuerie des manifestant en 1991, aucun rapport de cette teneur n’a jamais été publié sur l’état de la justice et l’état des prisons dans ce pays. Pourtant un bon nombre d’organisations ont lutté des années durant pour faire connaître à la communauté internationale les dysfonctionnements de la justice, dysfonctionnements qui sévissent depuis 27 ans dans l’île. Elles ont dénoncé la situation déplorable et surpeuplée des prisons malgaches et cela depuis bien des années.


« Ce qui me surprend le plus dans ce rapport, nous indique un spécialiste, c’est que la longue introduction fait la part belle aux membres de l’ancien régime pendant la crise qui suivit les élections. Hors, s’il est indéniable qu’il y a eu des crimes, il faut bien rechercher les criminels! »


Le rapport d’Amnesty International indique ainsi avoir reçu « des informations sur de nombreux abus des droits humains qui ont été commis pendant la crise par les partisans et les forces de sécurité de Didier Ratsiraka mais aussi par ceux de Marc Ravalomanana ». Le rapport d’Amnesty met en exergue la volonté du nouveau gouvernement malgache à lutter contre l’impunité mais dénonce un certain nombre de dysfonctionnements de la justice qui subsisteraient encore aujourd’hui. Amnesty cite ainsi le cas de Venance Raharimanana qui s’était exprimé à la télévision de Mahajanga sur la notion d’indépendance de la région pendant la tentative de sécession et dont le procès « fait peser de sérieux doutes quant à l’indépendance et l’impartialité de la justice à Madagascar et quant au respect du principe de l’égalité de tous devant la loi »


D’après Amnesty, « la plupart des personnes détenues en attendant leur procès ont pu recevoir des visites de leurs avocats en prison. » Pourtant Tantely Andrianarivo, dernier premier ministre de Ratsiraka, n’aurait pas pu voir ces avocats alors qu’il était placé sous résidence surveillée dès le 27 mai 2002. Pendant cette période, il a cependant pu s’exprimer librement dans la presse au sujet de ses conditions de détention et des « relations cordiales » qu’il entretenait avec le nouveau premier ministre. Notons que cette haute personnalité politique de l’ancien régime est la seule à ne pas avoir pu s’enfuir du pays après que les forces armées loyales à Marc Ravalomanana aient reconquis l’Ile.


En conclusion, nous vous engageons à lire le rapport d’Amnesty publié à l’adresse indiquée ci-dessous et nous espérons que la justice malgache et le nouveau pouvoir s’attacheront à faire leurs les recommandations qui s’y trouvent et en particulier à être plus vigilants sur les déroulement des actes judiciaires. Nous espérons également que ce rapport ne sera pas utilisé à des fins politiques ou pour faire pression en faveur des membres de l’ancien régime qui attendent encore leur comparution devant les tribunaux.


Mais finalement si un rapport si détaillé a pu enfin être publié sur la situation à Madagascar, c’est que ce n’est que maintenant que de telles institutions peuvent agir et enquêter librement sur le terrain. Et cela, c’est tout de même bon signe…


Vous pouvez consulter le rapport, publié en français, avec un résumé en anglais, à l’adresse électronique suivante : http://web.amnesty.org/aidoc/aidoc_pdf.nsf/index/AFR350042002FRENCH/$File/AFR3500402.pdf
Pour obtenir de plus amples informations, veuillez contacter le Service de presse d’Amnesty International, à Londres, au +44 20 7413 5566 ou consulter le site www.amnesty.org