vendredi , 10 mai 2024
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Les attributions du Sénat, la Chambre haute, sont bien spécifiées par la Constitution. Mais beaucoup se demandent, aujourd'hui, dans un pays aussi pauvre que Madagascar, quant à la nécessité d'une telle institution.

Le Sénat : une Chambre de trop ?

Puisque la Constitution l’y contraint, le Sénat a tenu séance plénière le 21 janvier, à l’instar de l’Assemblée nationale qui tenait, après la proclamation officielle des résultats des législatives, une session spéciale le même jour. Si pour l’Assemblée nationale l’ordre du jour de la première session, une session spéciale, est la mise en place du bureau permanent (voir nos brèves du 21 janvier), le Sénat, cette fois, se réunit pour ériger six différentes commissions. La dernière session, au niveau du Sénat, avait lieu trois mois auparavant. Dans son discours d’ouverture de la session d’hier, le président de cette institution, Rajemison Rakotomaharo, devait devancer les éventuelles récriminations : « certains pourraient se demander pourquoi la mise sur pied des commissions soit aussi tardive » a-t-il annoncé alors. Il avait, par la suite, parlé de « démarche sénatoriale », tout en laissant entendre que rien ne sert de courir.

La Constitution malgache stipule, en son article 77, que « Le Sénat comprend, pour deux tiers, des membres élus en nombre égal dans chaque province autonome et pour un tiers, des membres nommés par le président de la République, en raison de leurs compétences particulières en matière juridique, économique, sociale et culturelle. » Et c’est la raison pour laquelle, le Sénat, actuellement, est la seule et unique institution de la République malgache qui comprend encore en grand nombre, jusqu’au niveau de son bureau permanent, des sympathisants de l’ancien président Didier Ratsiraka, issus du parti AREMA. Ils sont 3 à être élus députés de Madagascar, au cours des législatives du 15 décembre, sous la bannière du parti de l’ancien chef d’Etat. Au sein du Sénat, ils sont plus d’une trentaine. C’est parce que la plupart des 90 Sénateurs, à l’exception de deux membres, furent élus sous la présidence de Didier Ratsiraka, avec les influences que cela suppose en matière d’élection. Et les 30 autres membres étaient, conformément à la Constitution, nommés par lui-même. Une aubaine pour lui, quelques années auparavant, de « caser » les fidèles sympathisants non encore récompensés.


Si, aujourd’hui, le Sénat n’est plus aussi dominé par les pro-Ratsiraka, c’est en raison de la nomination par le nouveau président, Marc Ravalomanana, en remplacement de ceux nommés par son prédécesseur, de 30 nouveaux Sénateurs. Ce qui, naturellement, a permis, dans le même temps, de placer Rajemison, un bras droit de Ravalomanana, à la présidence de cette institution.


Les Sénateurs malgaches bénéficient, toutes proportions gardées, des mêmes avantages matériels que les députés. D’autant qu’en cas de vacance de la présidence de la République, la Constitution le stipule également,  » les fonctions de Chef de l’Etat sont provisoirement exercées, jusqu’à l’entrée en fonction du président élu(?) par le président du Sénat. » Cette institution, en tout cas, a été rétablie dans la Constitution de la troisième République à la suite du mouvement populaire de 1991, qui allait écarter temporairement du pouvoir Didier Ratsiraka. Sa mise sur pied a cependant pris du temps. Placé, pour le moment en plein centre ville, le palais du Sénat, pourrait être transféré. Son parvis, en temps ordinaire, sert d’abris à des sans domicile fixe que les gardes autorisent à y dormir de 21 heures à six heures du matin.


Pour le développement de la Grande Ile, le rôle que pourrait jouer le Sénat, une institution qui coûte malgré tout assez cher aux contribuables malgaches, ne convainc pourtant pas grand monde. En 1999, un parlementaire français, de passage à Madagascar, a annoncé : « vous avez d’autres chats à fouetter? pourquoi une démocratie à l’occidentale qui comprend toutes ces institutions ».