jeudi , 2 mai 2024
enfrit
Les accès de violence des forces de l’ordre en guerre contre les dahalo ou voleurs de zébus et leur famille ont provoqué un déferlement de critiques. Si les remontrances des citoyens, de la société civile et des politiciens non proches du régime n’ont pas été entendues, la HAT ne peut pas faire la sourde oreille devant Amnesty International. Sur le terrain, la stratégie de la terre brulée et des exécutions sommaires porte son fruit, mais l’objectif principal n’est pas atteint. Le grand chef Remenabila court toujours.

Opération Tandroka : le permis de tuer de la HAT et de ses hommes contesté

Pour sa défense, la HAT a parlé par la voix de son porte-parole de toujours, le ministre de la Communication Harry Laurent Rahajason. L’argument est simple : il n’y a pas de procès à faire de la mission des forces de l’ordre quand il s’agit de dahalo tués et que l’on sait armés. L’audiovisuel national et la chaîne privée du président de la Transition ont été très actifs sur la propagande autour de cette guerre ou guérilla.

Les hommes du Colonel Lylison, le chef de l’opération sur le terrain mais qui n’est pas le premier responsable en matière de commandement, sont passés pour des héros capables de marcher durant des heures dans la nuit pour attaquer un village et abattre une douzaine d’hommes armés sans faire de victime parmi les femmes et les enfants. L’heure de gloire et l’hypothèse d’une guerre chirurgicale avec des kalachnikovs sont révolues. 

Les autres médias indépendants ont rapporté une tout autre réalité. Des femmes et des enfants tués par balle, des présumés dahalo exécutés, des assassinats ciblés de présumés chefs ou bras droits de Remenabila… ont été révélés au grand jour. Si tout cela pouvait avoir lieu dans le cadre d’échanges de tirs, on ne peut pas dire autant des pillages et des incendies de villages entiers perpétrés par des éléments des forces de l’ordre. Résultats, de nombreux villageois fuient à nouveau leur village pour trouver refuge dans la forêt.

Violation grave des droits de l’homme ou pas, la stratégie de la terre brulée serait justifiée et a déjà été utilisée dans le passé. Le but est de harceler les dahalo et de les empêcher de revenir habiter dans un village qui les a accueillis. Il y a alors un à priori majeur : tous les habitants du village sont des dahalo ou leurs complices, hommes, femmes et enfants.

Le ministre Julien Reboza a défendu les actions de la petite armée de la HAT envoyée faire la guerre  dans le sud d’où il est originaire. « Les gens qui critiquent ne connaissent pas le problème et n’ont pas de membres de famille tués par les dahalo », a-t-il déclaré, réfutant de manière énergique toute idée d’exterminer une frange de la population Bara dont le vol de zébus fait partie de la culture.

Des personnalités politiques du sud voient les choses différemment et dénoncent les exécutions sommaires et les incendies de village perpétrés dans le cadre de l’opération Tandroka. L’ancienne parlementaire Louisette Raharimalala a rappelé l’origine du problème qui était « un règlement de compte entre Remenabila et les gendarmes ». Le chef des dahalo a eu, selon elle, une commande de 6000 têtes de zébus, mais un différend sur les prix aurait changé les choses.

Sur le terrain, les hommes du colonel Lylison traquent les dahalo dans leurs villages et pour la première fois, ont atteint les fameux « zohy », ces zones où les forêts denses et les grottes permettent de cacher des centaines de zébus. C’était sans compter sur les images satellites. L’attaque n’a pas permis de capturer Remenabila qui serait toujours blessé.

Amnesty international va-t-elle raisonner la HAT et son armée et leur rappeler que même dans les guerres, le respect des droits reste essentiel. Louisette Raharimalala a quant à elle tiré la sonette d’alarme : « il n’y a jamais eu de régime aussi meurtrier que celui-ci ».