samedi , 11 mai 2024
enfrit
Sans le paraître, l'opinion publique suit avec circonspection les procès des "rebelles" qui continuent de se dérouler au tribunal d'Anosy. Elle souhaite que la justice soit plus conséquente.

Une justice tangente

L’arrestation des individus impliqués dans la crise post électorale, leur audition et les sanctions qui leur ont été infligées sont toujours objet de suivi de la part de la presse. La condamnation à deux ans de prison et des amendes imposées à l’ancien ministre Fredo Betsimifira ou l’interpellation et l’audition de Rolland Ratsiraka puis sa relaxe sont commentées de toutes sortes. Bien avant cependant les autres arrestations et condamnations ont toujours provoqué des vagues qu’on ne peut ignorer et les partisans de l’ancien régime ne ratent aucune audition ou condamnation pour hausser le ton. Ils accusent la Justice, les juges d’instruction, les procureurs et les gouvernants actuels de chasse aux sorcières. Afin de freiner leur ardeur et en réponse à leurs critiques sur les arrestations, le gouvernement Sylla a du faire appel au ministre de la Défense, soutenu en d’autres circonstances par la ministre de la Justice et par le ministre de la Sécurité publique.

Tout le monde admet et reconnaît qu’il n’est pas question de justice tribale ou tribaliste. On s’interroge toutefois sur un certain caractère tangent des instructions inculpations qui, pour beaucoup de gens n’auraient pas suffisamment insisté sur les méfaits de leurs actes. Les individus arrêtés par les forces de l’ordre ont fait perdre leur travail à des milliers de chefs de ménage. Ils ont semé la terreur. Ils ont provoqué et hâté la mort de leurs concitoyens. Ils ont détruit l’économie. Ils ont privé le Malgache de sa liberté. Ils ont mis le pays à genoux et réduit la nation et l’Etat à la mendicité.

Au vu des verdicts rendus jusqu’à présent contre la grande majorité des individus inculpés, beaucoup de citoyens anonymes, usagers des tribunaux et de la Justice estiment que ce sont de petites peines par rapport aux dégâts qu’ils ont causé au pays et aux Malgaches. En comparaison avec les voleurs de zébus ou ceux qui ont détourné des fonds publics, les deux ans d’emprisonnement et les amendes exigibles des condamnés à l’issue de ces procès sur la crise ne sont grands choses. L’opinion conclut que la Justice est trop clémente. Deux ans d’incarcération sont des peines courantes pour de présumés voleurs détenus en préventive et qu’on relâche par la suite pour manque de preuves tangibles, remarquent de petits commerçants à la sauvette des trottoirs d’Anosikely. Ces derniers relèvent au passage l’intérêt et la portée des questions relatives aux droits de l’homme et des citoyens.

Si la presse s’attend encore à des procès à sensations avec des rebondissements et des condamnations spectaculaires ou des relaxes pures et simples à l’image de celle dont a bénéficié Rolland Ratsiraka, l’opinion publique est déjà lasse. Elle laisse faire la Justice sans pour autant être indifférente, au nom de la transparence et de la vérité, sur les peines infligées aux accusés.

RAW