vendredi , 1 novembre 2024
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Un débat sur la forme pour éviter le débat de fond
Le président Hery Rajaonarimampianina réagissant à la fronde des députés (Ph. PRM)

Un débat sur la forme pour éviter le débat de fond

Le sort du président de la République est entre les mains de la Haute Cour Constitutionnelle. Cette situation de fait justifierait déjà sa déchéance, car à 15 mois après son investiture, c’est la Haute Cour de Justice qui devrait juger la motion déposée par les députés. Par le passé, les juges constitutionnels se sont montrés indulgents envers le chef de l’Etat qui a pu nommer lui-même un premier ministre au lieu de composer avec le parti majoritaire à l’Assemblée nationale. Une nouvelle fois, le débat risque de se limiter sur la forme, la manière avec laquelle la motion de déchéance a été votée pour infirmer la requête au lieu de se concentrer sur les violations avérées ou non de la Constitution par celui qui devrait en être le premier défenseur.

A fond dans le vice de forme

Les partisans du président Rajaonarimampianina et lui-même s’attaquent à la motion des députés en cherchant les petites anomalies et les fraudes présumées pour faire annuler le vote. Certains députés pro-régime contestent le fait que le contenu de la motion n’ait pas fait l’objet d’une lecture avant de passer au vote. Le débat central est quand même le nombre de votants dans l’antre de l’Assemblée nationale. Pour les pro-HVM, seulement 105 députés ont été présents et 26 ont quitté la salle avant le vote. Ils n’admettent pas que 125 députés sur les 150 que compte le parlement aient pu voter. En tout cas, ils sont 4 à déposer le bulletin Non dans l’urne.

Ceux qui ont voté la motion de déchéance réfutent : « tous les députés ne sont pas nécessairement dans la salle durant toute la durée du vote, il y en a qui entrent et d’autres qui sortent ». Les parlementaires ne sont pas des électeurs anonymes, on sait s’il y a usurpation. Le président de la République lui-même est convaincu que le nombre de votants a été artificiellement gonflé, dénonçant des fraudes et de la corruption. Il espère ainsi que la HCC rejette d’emblée la motion pour vice de forme. Les juges pourraient sortir une nouvelle fois l’argument du flou et de l’incertitude sur l’atteinte du quorum ou de la majorité de 2 tiers, sinon le non respect du règlement intérieur de l’Assemblée.

L’évidence du fond rend le débat superflu

La HCC n’aura pas du mal à statuer sur le fait que la Haute Cour de Justice a été mise en place ou non avant le 25 janvier 2015. Même si le non-respect de l’article 54 de la Constitution est évident, les juges ne peuvent plus aller dans ce sens au risque de se déjuger. Il reste à savoir si l’ingérence du chef de l’Etat qui règlemente à coup d’ordonnance le fonctionnement de l’Assemblée nationale est une violation du pouvoir qui mérite une déchéance. De même, le non-respect de la laïcité de l’Etat à cause de la participation active aux assises de la réconciliation menées par la FFKM est discutable.

Pour sa défense, Hey Rajaonarimampianina n’a pas réfuté les arguments légaux de députés. Il a essayé de jeter le discrédit sur les élus en les accusant d’être des corrompus qui sont motivés par un intérêt personnel, des auteurs de déstabilisation politique profitant du passage d’une mission du FMI. Pour le chef de l’Etat, sa destitution est trop importante pour qu’elle soit expédiée en une demi-journée, avec des arguments qui sont le filigrane d’intérêts d’une personne. Il accuse les députés de se venger de lui, car il ne leur a pas accordé les voitures 4×4, un an plus tôt. L’attaque du président n’a pas plu aux députés. Que le président utilise l’argent des 4×4 pour réaliser ses promesses sur la fin des délestages ou la gratuité de l’enseignement primaire, rétorquent-ils. Les auteurs de la fronde affichent un peu plus leur solidarité et surtout leur nombre. Ils sont bien plus de 120.

A.H