vendredi , 19 avril 2024
enfrit
Didier Ratsiraka sort ses dernières cartouches en décrétant la loi martiale à Antananarivo, tandis que Marc Ravalomanana vient de mettre sur pied son gouvernement.

Loi martiale pour Radidy, nouveau gouvernement pour Ravalo

Deux présidents de la République, deux Premiers
ministres et deux gouvernements. La Grande Ile voit désormais
double au niveau de la haute sphère du pouvoir. Marc
Ravalomanana et son Premier ministre, Jacques Sylla, ont mis sur pied
ce vendredi le gouvernement tant attendu par les manifestants qui
aspiraient depuis belles lurettes à de nouvelles têtes
dans les institutions de la République. Dorénavant, et
on ne sait pour combien de temps, deux gouvernements dirigeront le
pays. Ceux qui croyaient que le président sortant Didier
Ratsiraka allait se retirer poliment, au cas où Ravalomanana
continue à avancer, se seraient trompés. Le président
Ratsiraka vient en effet de décréter la loi martiale
pour la province d’Antananarivo, la seule province, à ses
yeux, qui fait fi de l’état de nécessité
nationale que son gouvernement a décrété la
semaine dernière. Pour appliquer la loi martiale, Didier
Ratsiraka a nommé le général Léon Claude
Raveloarison, Gouverneur militaire de la province d’Antananarivo.


Dialogue


Désormais, au plus grand malheur des quelques millions de
partisans de Marc Ravalomanana, dans la capitale malgache, les forces
de l’ordre pourront tirer sur la foule après sommation en cas
de rassemblement public. Le général Raveloarison, pour
ne pas donner de sa personne l’image d’un «boucher » en
puissance, a tenu à rassurer la population en annonçant
que le dialogue sera privilégié. Et que l’utilisation
de la force sera un dernier recours. La décision de Didier
Ratsiraka a suscité une double réaction dans le camp de
Marc Ravalomanana. Certains en sont ravis, sachant qu’il s’agit sans
doute là des dernières cartouches du président
sortant dans cette guerre qui ne dit pas son nom. D’autres en sont
inquiets, car à tout moment la capitale pourrait être
gérée, dans ce contexte, dans le feu et le sang.
Puisque l’état de nécessité nationale a été
un véritable fiasco à Antananarivo, la loi martiale est
le dernier recours pour l’amiral rouge – comme on aime à
qualifier Didier Ratsiraka – d’asseoir son pouvoir. Un pouvoir, il
faut le reconnaître, qui ne cesse de s’amenuiser au fil du
temps. Le président sortant, jeudi, n’était même
plus capable de communiquer via la radio et la télévision
nationale sa décision de décréter la loi
martiale, tandis que les membres de son gouvernement, dirigé
par le Premier ministre Tantely Andrianarivo, donnent l’impression de
vivre et de travailler dans la clandestinité.


En face, Marc Ravalomanana a fait connaître, au cours d’une
cérémonie rigoureuse, les membres de son gouvernement.
Une cérémonie à haut risque étant donné
que Didier Ratsiraka se considère toujours comme le «vrai
président de la République ». Il a affirmé
que «c’est à contrecoeur qu’il a pris la décision
» d’instaurer la loi martiale, mais qu’il espère ainsi
rappeler son rival à la table des négociations, «si
négociation doit y avoir » a-t-il conclu. En tout cas,
Jacques Sylla, Premier ministre de Ravalomanana, a annoncé
qu’il n’accorde aucun crédit à la loi martiale décrétée
par le camp d’en face, et que son gouvernement va s’atteler au défi
du développement dès que possible.