mardi , 23 avril 2024
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Nouvelle polémique sur le projet de code de la Communication
En 2014, des journalistes sont descendus dans la rue pour s'opposer à l'emprisonnement de deux confrères

Nouvelle polémique sur le projet de code de la Communication

 

C’est une polémique qui n’en finit pas depuis une dizaine d’années maintenant. Le débat sur le projet de code de la Communication revient au galop depuis quelques jours. La polémique est surtout née quand les Sénateurs, après examen du projet de loi, ont décidé de supprimer une disposition qui prévoit l’abrogation de l’article 20 de la loi sur la lutte contre la cybercriminalité.

Cet article 20 dispose : « L’injure ou la diffamation commise envers les Corps constitués, les Cours, les Tribunaux, les Forces Armées nationales ou d’un Etat, les Administrations publiques, les membres du Gouvernement ou de l’Assemblée parlementaire, les fonctionnaires publics, les dépositaires ou agents de l’autorité publique, les citoyens chargés d’un service ou d’un mandat public, temporaire ou permanent, les assesseurs ou les témoins en raison de leurs dépositions, par les moyens de discours, cris ou menaces proférés dans les lieux ou réunions publics, soit par des écrits, imprimés, dessins, gravures, peintures, emblèmes, images ou tout autre support de l’écrit, de la parole ou de l’image vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans les lieux ou réunions publics, soit par des placards ou des affiches exposés au regard du public, soit par le biais d’un support informatique ou électronique, sera punie d’un emprisonnement de deux ans à cinq ans et d’une amende de 2.000.000 Ariary à 100.000.000 Ariary ou l’une de ces peines seulement. »

Depuis son adoption en catimini en 2014, cette loi sur la cybercriminalité a soulevé diverses passions. Cet article 20 est supposé contraire au principe de la « dépénalisation du délit de presse et d’opinion ». Un principe adopté par de nombreux pays et qui prévoit que l’on n’emprisonne pas un individu pour une opinion ou un délit d’opinion, sans pour autant favoriser l’impunité. Le projet de code de la Communication, qui a fait l’objet de diverses consultations depuis plusieurs années, prévoyait ainsi ce principe. D’où la disposition qui prévoyait aussi l’abrogation de l’article 20 de la Loi sur la lutte contre la cybercriminalité.

Actuellement, une centaine de journalistes ont signé une déclaration qui demande aux autorités et aux parlementaires de revenir sur l’avant projet de code de la Communication. Lequel a mentionné noir sur blanc l’abrogation de l’article 20 de la loi sur la lutte contre la cybercriminalité, un article jugé « liberticide ». D’autant que l’interprétation de ce que l’on entend par « injure » et « diffamation » ne se limite jamais à leur définition linguistique ou juridique, d’après les expériences vécues à Madagascar.

En 2015, le système des Nations Unies à Madagascar a appuyé les ateliers de consultation concernant l’élaboration du projet de code de la Communication. Des juristes ont accompagné le processus. Mais ils déplorent actuellement la modification apportée par le Sénat. Omer Kebiwou Kalameu, Conseiller aux droits de l’homme auprès du Bureau de la Coordination résidente du Système des Nations Unies à Madagascar, a ainsi jugé important de « revenir au consensus de 2015 ». Il s’est exprimé à l’issue d’une rencontre avec le président de l’Assemblée Nationale, qui devra aussi se pencher incessamment sur le projet de code de la Communication.