Les représentants des bailleurs de fonds doivent-ils agir avant tout en tant que diplomates et respecter leur obligation de réserve ? Oui, certains ambassadeurs l’ont affirmé, sans pour autant pointer du doigt leur homologue François Goldblatt. Le message est clair : on n’a pas à s’interférer dans les décisions prises par le gouvernement de Madagascar.
Qu’ils soient ambassadeurs d’un pays partenaire ou le représentant résident d’un organisme onusien ou continental, doivent-ils fermer les yeux et se taire devant certaines décisions politiques affectant la confiance envers le gouvernement et concernant les finances du pays. Tel est le fond du débat déclenché par les fameux tweet de l’ambassadeur de France à propos de l’affaire du Trésor Public.
Le gouvernement et tout l’exécutif ont fait bloc pour tancer fermement et sèchement François Goldblatt. « C’était une décision politique que le ministre des Finances a prise », « c’est une affaire interne qui ne concerne pas la France », « C’est de l’ingérence », « pourquoi la France se permet-elle de nous donner des leçons », « nous, on ne va pas commenter si la même chose se passait en France »… Le summum de l’indignation collective est l’incontournable « atteinte à la souveraineté nationale ».
Oui, on est souverain de limoger qui on veut. Par contre, on ne peut pas reprocher aux partenaires techniques et financiers de ne pas faire confiance au gouvernement quand ils reçoivent un signal négatif de celui-ci. Par ailleurs, l’ambassadeur Goldblatt a persisté en avançant qu’une telle réaction n’a rien d’anti-diplomatique. Tant que les finances du pays sont concernées, il promet presque de récidiver.
Pas de sanction en vue
Les bailleurs de fonds ne vont pas sanctionner directement Madagascar pour le limogeage d’Orlando Robimanana, celui qui a empêché un super ministère de se servir dans les caisses d’une société d’Etat pour financer ses travaux urgents. Il faudra attendre les conséquences d’une baisse de la confiance. La Facilité Elargie de Crédit avec le FMI n’est pas remise en cause par cette petite brouille, à condition que le nouveau Directeur général du Trésor ne permette pas ce que son prédécesseur avait refusé de faire.
La baisse de la confiance des bailleurs de fonds signifierait une réduction des aides et financements. Le signal est aussi intégré par les investisseurs et pourrait causer la baisse des entrées d’IDE. La raison en est le doute avéré sur la capacité des dirigeants à appliquer la bonne gouvernance, et probablement l’incertitude et la tension motivées par des considérations politiques. Le FMI attend du gouvernement malgache une augmentation du montant et l’efficience des dépenses publiques en faveur des pauvres et de la croissance.
Quand un ministère, chargé de surcroit des projets d’urgence et surtout présidentiels, demande à ce que l’on décaisse de l’argent public pour financer des travaux, on peut y trouver une certaine légitimité ou justification. Mais, ce serait contre l’orthodoxie financière et non conforme à la loi. Les bailleurs de fonds nous reprochent ces transferts de fonds, y compris pour la caisse des retraites des fonctionnaires, tout comme les subventions et le financement des entreprises publiques défaillantes. Quoi qu’en dise le ministre des Finances et du Budget, changer le directeur du Trésor public est perçu comme la volonté de l’Etat de faciliter ces transferts jugés comme symbole de la mauvaise gouvernance financière.
A. Herizo