dimanche , 28 avril 2024
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Un gendarme à la tête de l’APMF : mènerait-on en bateau les marins ?
Le port de Mahajanga, un grand port géré par l'APMF

Un gendarme à la tête de l’APMF : mènerait-on en bateau les marins ?

Le dialogue a dû mal à être engagé entre l’Etat et la Solidarité pour la défense des intérêts du monde maritime. La nomination d’un officier de la gendarmerie à la tête de l’Agence Portuaire Maritime et Fluviale est toujours contestée. Avec un peu de chance, l’OMI laissera passer l’affaire. Pas sûr que les professionnels de la marine marchande ne l’avertissent pas de la situation aussi incongrue qu’irrégulière.

Non, le colonel Jean Hubert Zipa n’est pas “the right man at the right place”. Le constat est aussi simple qu’évident. L’officier de la gendarmerie a sans doute bénéficié de certains aménagements du profil requis pour le poste de Directeur général de l’APMF mais cela ne le met pas à l’abri d’une sanction de l’Organisation maritime internationale qui risque de frapper tout le secteur. Le risque est tout de même minime, car il faudra alors constater que le nouveau directeur met réellement en péril le secteur maritime et mène le pays vers l’illégalité.

Une connaissance du milieu de la mer

On ne peut pas concevoir qu’« une connaissance approfondie de la navigation et du secteur maritime » peut être satisfaite par une participation dans le projet Equipe de protection embarquée (EPE) du ministère de la Défense et dans le processus de validation du code maritime même si ces deux activités aussi légères soient-elles ont duré plus de 5 ans. Le colonel Zipa se présente plutôt comme un manager, lui qui est diplômé en gestion. Il a des compétences en management que, selon lui, ne disposerait pas un capitaine de navire.

Seulement, ce qu’on attend du Directeur général de l’APMF n’est pas de gérer une entreprise. Pour ce faire, il fallait plutôt recruter un vrai gestionnaire de carrière qu’un gendarme. C’est bel et bien un marin de métier qui a le profil le plus approprié. La mission consiste à gérer la sureté et la sécurité maritimes, à appliquer les lois et les règlementations internationales, à gérer la navigation, à développer l’économie des ports… Le gendarme se montre présomptueux s’il pense faire mieux qu’un ingénieur en chef ou un capitaine de marine marchande et en convaincre l’OMI.

Un choix politique sans conséquence immédiat

Pas la peine de crier à l’ingérence si l’Organisation rappelle effectivement Madagascar à l’ordre. Attention, une telle sanction ne tombe pas du jour au lendemain. La mésaventure des Philippines, le pays où il y a plus de marins au monde est une référence. On ne peut pas violer impunément les règles de l’OMI que ce soit en matière de gestion des ports et des navigations que pour la formation des marins. Oui, Madagascar risque d’être suspendu pour des raisons techniques, mais pas uniquement à cause du choix du directeur de l’APMF. Ce qui signifie que ses ports, ses marins et ses navires seront interdits.

Le contexte politique de la nomination du colonel Zipa ne plaide pas en sa faveur. L’officier a été le responsable des passations des marchés au sein du ministère d’Etat en charge des Projets présidentiels, de l’Equipement et de l’Aménagement du territoire. Il s’est distingué pour avoir lancé un appel d’offres au profit de l’APM pour la fourniture de… motos cross. Sa nomination n’aurait pas été possible sans l’appui d’un homme politique puissant. Le ministre Rivo Rakotovao a-t-il placé son homme de confiance à la tête de l’APMF en vue de grands projets présidentiels relatifs aux ports ? La logique est là.

A. Herizo