jeudi , 18 avril 2024
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Lors de la célébration de la journée mondiale des propriétés intellectuelles, le ministre de l’Economie, Fienena Richard, a relevé les lacunes en matière de législation pour lutter contre la contrefaçon. Les prédateurs des droits d’auteur exercent leur forfait sans trop d’inquiétude malgré les quelques coups de filet faits par les forces de l’ordre. Le piratage des œuvres fait reculer considérablement la production artistique.

Violation de droits d’auteur : vers une législation plus répressive

A regarder les produits de contrefaçon, communément appelés « pirates » sur les marchés, il n’y a pas de loi qui protège les droits d’auteurs à Madagascar. La loi n° 94 – 036 du 18 septembre 1995 portant sur la propriété littéraire et artistique ni le décret n° 98 – 434 du 16 juin 1998 portant statut et fonctionnement de l’Office Malagasy du Droit d’Auteur (OMDA) n’ont pas permis d’éradiquer le fléau. La loi n’est pas assez dissuasive en particulier sur les sanctions pénales : les personnes qui ont volontairement commis, à une échelle commerciale des actes de piraterie sont punies d’amende importante ou de condamnation à des peines de prison. Sur ce point, nombreux sont ceux qui réclament de la sévérité en fixant le montant ou le nombre d’années.

Comme pour les sanctions pénales, les artistes ne sont pas toujours satisfaits par les mesures correctives civiles prévues par la loi. Difficile en effet pour un titulaire de droits de recevoir un dédommagement adéquat compensant la perte économique ni autre indemnité pécuniaire. « Le mieux que l’on puisse espérer c’est de voir les +pirates+ cesser de vendre les copies de nos CD », se désole un artiste de variété. « On n’ose même plus sortir un album, explique-t-il. Comme on diffuse des clips à la télé, ces voleurs vont carrément jusqu’à produire un VCD à notre place en y compilant sept ou huit chansons ». L’application de la loi la plus courante est la perquisition des locaux des auteurs de contrefaçons. Cela se termine généralement par la saisie des marchandises, en l’occurrence des CD et DVD, et des matériels utilisés pour faire les copies.

Le cinéma malagasy a vu son essor freiné par les pirates. En cause, un mode de distribution et de consommation qui favorise la vente de VCD au détriment de la diffusion dans les salles obscures. « Pour nous qui travaillons dans le septième art, le piratage nous décourage, se plaint l’actrice et productrice Volatiana. Dès que nous sortons un produit, il est piraté ». Parfois, les contrefacteurs devancent même la maison de production en se procurant des copies du film encore en post-production. Les artistes sont obligés de brader leur produit pour concurrencer les contrefaçons. Les VCD originaux sont proposés à 4 000 ariary alors qu’une copie d’une piètre qualité se vend à 2 000 ariary. La différence entre les deux produits se situe au niveau de la durée de vie. La production artistique est un produit de consommation périssable, favorisant l’achat d’un VCD qui sera usé après une vingtaine de lecture.

A l’instar de la lutte contre le trafic de bois précieux, le gouvernement prévoit de monter un task force interministériel pour lutter contre la violation de droit d’auteurs. Cet organe va s’atteler en premier lieu au renforcement de la législation. Le dernier artifice légal en date est l’arrêté interministériel N° 12226 – 2006 qui a déjà fixé des mesures renforçant la lutte contre la contrefaçon des œuvres littéraires et artistiques. Une brigade spéciale anti-contrefaçon chargée de la répression devait être instituée auprès de la Police Nationale et de la Gendarmerie Nationale. Les officiers de Police judiciaire, les agents des Douanes, du commerce ou de l’OMDA doivent procéder à la constatation des infractions, sans plainte préalable des auteurs ou de leurs ayants droit, à la saisie des produits « pirates ». Avant de changer la loi, il faut bien penser à la manière et au moyen de l’appliquer.