samedi , 20 avril 2024
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Andry Rajoelina a commencé son mandat inconstitutionnel 3 mois après Barack Obama. Alors que le président élu des Etats-Unis est en fin de mandat, le chef de l’autorité de fait de Madagascar est solidement installé sur son fauteuil un an après le mandat que la HCC lui a donné après avoir pris acte du changement anticonstitutionnel de gouvernement. Malgré une autosatisfaction affichée par Andry Rajoelina, le bilan de ses trois ans de pouvoir est nettement négatif.

Andry Rajoelina, un mandat complet sans être président

Comme Obama, Andry Rajoelina brigue un deuxième mandat, un vrai, après avoir vu le pays sombrer dans la crise. Si le premier a hérité d’une situation complexe sur le plan national et mondial, le second a plongé la nation dans une crise sans fin pour prendre et garder le pouvoir. La comparaison au président américain n’est pas totalement incongrue puisque les deux personnalités ont fait des promesses via le changement. Si Obama est vivement critiqué pour sa réussite incomplète, le président de la HAT défend son bilan pour les trois années catastrophiques que vient de traverser Madagascar.

Quelques arbres pour cacher la forêt

Des promesses lors de la propagande avant le coup d’Etat militaro-civil de 2009, Andry Rajeolina a le mérite d’essayer de les tenir. Ainsi, l’huile de Tiko qui était à 3500 ariary le litre était trop cher et que le maire d’Antananarivo de l’époque saurait faire baisser le prix à 2500 ariary. C’était bien le cas lors de l’opération tsena mora, un jour par semaine pour les bas quartiers d’Antananarivo. Ce n’était que feu de paille : la réalité est que l’huile alimentaire côute 5500 ariary en 2012.

De même, le vary mora à 900 ariary le kilo n’a pas empêché le prix du rix d’augmenter. Idem pour le prix de l’essence, après avoir usé de la prérogative gouvernementale pour maintenir les tarifs, la loi du marché est en train de reprendre le dessus. Les malgaches auront compris que la promesse politique ne peut changer les réalités économiques.

Andry Rajoelina a eu quelques fiertés personnelles durant ses trois ans de mandat imposés aux malgaches. Dernièrement, il s’est montré fier de donner à Air Madagacsar la possibilité d’avoir ses propres avions. Une vente location sur six ans et hop, les deux Airbus 340 d’Air France seront les propriétés d’Air Madagascar. L’avion présidentiel Air Force One n’a pas encore trouvé preneur.

La construction des hôpitaux modernes et équipés financés par les 100 millions de dollars soutirés à Wisco donnerait aux malgaches un accès à des soins jusque-là réservés aux riches.  Voilà qui devrait faire oublier la dégradation de la santé publique même si ce secteur humanitaire n’a pas été complètement boycotté par les bailleurs de fonds.

Echec sur les plans économique et social

Sur le plan économique, les investisseurs du Moyen-Orient promis par Andry Rajoelina ne sont pas venus. Du moins, le marché malgache a été inondé par des produits bien de mauvaise qualité provenant de pays arabes. La bonne gouvernance promise dans le secteur minier a été sabordée par le projet Mainland qui est déjà en phase d’exploitation sans une autorisation officielle ni légale.

Andry Rajoelina peut se vanter d’avoir vu les recettes de l’Etat augmenter pour se passer des aides internationales et ne pas céder aux pressions diplomatiques. L’effet de la suspension des financements a été ressenti sur les programmes liés aux infrastructures. La HAT se contente de construire une route nationale, la RN 44 pour prétendre que le gouvernement malgache peut le faire avec ses propres moyens. Elle a construit l’amphithéâtre en plein air d’Antsonjombe pour satisfaire les organisateurs de spectacle.

L’échec total de la HAT se trouve dans le domaine social. Le secteur de l’éducation a été marqué par la déperdition scolaire avec 700 000 élèves déscolarisés en 2010. L’Etat a fait un effort pour aider les enseignants vacataires payés par les parents d’élèves, mais le malaise social persiste. A l’université, la situation est encore pire avec des programmes complètement tronqués par la grève des enseignants chercheurs. 

Enfin, si les forces de l’ordre sont assez efficaces dans la capitale pour empêcher toute manifestation d’opposition, elles n’arrivent plus à assurer la protection des citoyens. Les routes nationales n’ont jamais aussi dangereuse la nuit ; l’insécurité dans les villes et dans les campagnes fait croire à l’absence d’autorité.

Plutôt Haïti que les Etats-Unis !

Finalement, si on devait comparer Andry Rajoelina à un président, ce n’est pas celui des Etats-Unis mais de Haïti, Michel Martelly. Il y a plus de similarité. La promesse de changement et la déception quand la situation a changé mais en pire. Peut-être qu’un chanteur populaire fait un plus mauvais président qu’un DJ.

Andry Rajoelina a au moins pris le soin de continuer le coup d’Etat jusqu’au parlement après avoir renversé le président. C’est le premier président qui crée un parti et qui a la majorité parlementaire sans élections, avec comme passé électoral une élection municipale. En tout cas, l’aventure politique de leur président de fortune a apporté du changement à Haïti et à Madagascar :  une plus grande pauvreté.