On n’a jamais eu autant l’impression, à Madagascar, de se trouver dans un pays où l’Etat est de plus en plus incapable d’assumer sa mission. Certains acteurs politiques parlent régulièrement, depuis le coup d’Etat de 2009, de « défaillance de l’Etat ». Une situation marquée par la pérennisation de la gabegie et de l’anarchie dans différents domaines.
Le cas le plus récent qui a scandalisé plus d’uns a été celui relatif à la vindicte populaire survenu dans la localité Nosy Varika, dans le Sud-est du pays, le 21 mars 2016. Sous la pression d’une foule en colère, la gendarmerie et les représentants des autorités locales ont lâché deux suspects arrêtés à la suite d’un viol suivi de meurtre. Les deux suspects ont été livrés à la foule, puis sauvagement exécutés. Une condamnation à mort qui a quelque peu tiqué des juges de la région.
L’incapacité de l’Etat à asseoir une véritable autorité se reflète ainsi dans divers domaines à travers la Grande Ile depuis le coup d’Etat de 2009, marqué par une mutinerie au sein de l’armée et des émeutes qui ont débouché sur le saccage de nombreux magasins et entreprises privées. Depuis lors, le pays a beaucoup de mal à s’en remettre.
Il s’avérait naturellement de plus en plus difficile de faire régner la discipline, que ce soit au sein de l’armée ou au niveau de la population. Il va falloir du temps pour remettre sur les rails un véritable Etat de droit où tout le monde doit se soumettre aux lois en vigueur dans le pays. C’est ainsi que les trafics en tout genre ont régné. Les trafiquants d’or, de bois de rose, d’espèces animales protégées et de pierres précieuses étaient devenus intouchables. L’Etat, souvent complice, s’en est lavé les mains. Beaucoup d’analystes ont parlé de « pillage des ressources naturelles du pays ». Mais jusqu’à présent, on attend, en vain, la réaction vigoureuse de l’Etat, au-delà des beaux discours.
Le phénomène d’insécurité, qui a connu une importante recrudescence, fait partie aussi des corollaires de l’anarchie et du coup d’Etat de 2009. Le comble est que, les élections censées sortir le pays de la crise, en fin 2013, ont été très mal organisées et n’ont pas permis de déboucher sur une véritable solution durable. L’exclusion d’une dizaine de candidats à l’élection présidentielle a été la première entorse à la démocratie lors de ce scrutin. Mais cette proposition a été entérinée par la Communauté Internationale. Il en est ressorti un président de la République mal élu, contesté et saboté dès son investiture. Il n’est guère étonnant, ainsi, de voir le régime Hery Rajaonarimampianina actuellement patauger dans diverses difficultés et incapable d’instaurer la véritable autorité de l’Etat. Il n’est pas étonnant non plus d’entendre de plus en plus d’acteurs politiques évoquer la nécessité d’une élection présidentielle anticipée.